19.09.2020 – Minéraux des rodingites (Zermatt, Valais, Suisse)

Départ de Lausanne à 3h30 du matin. C’est tôt mais il y a 2h30 de route puis 1000 mètres de dénivellation et j’ai envie de profiter un maximum de la journée, d’autant plus qu’il annonce des orages en fin de journée. J’ai même pris mon vélo pour gagner du temps à la descente.

Le début de la vallée est magnifique mais surtout sauvage, ce qui est plutôt rare dans la région de Zermatt, un endroit dominé par les chalets et les remontées mécaniques. Il faisait encore nuit quand j’ai traversé cette vallée en longeant son torrent. Je distinguais dans la nuit étoilée, les yeux brillants des chamois qui ne semblaient pas perturbés par ma présence.  En remontant cette vallée on traverse des écailles de roches ayant subis un métamorphisme de haute, voir ultra haute, pression en faciès éclogite lors de la formation des Alpes. Ces roches constituaient, il y a 160 Ma, une croute océanique formée de basaltes et de gabbros ainsi que de roches mantelliques.

Après avoir remonté cette vallée, s’en suit la une longue montée sur la moraine de fond d’un glacier aujourd’hui presque entièrement disparu. Cette moraine et dominée par des blocs de métagabbros, métabasaltes et serpentinites. Bien que ces roches aient subies un métamorphisme de haute pression, les textures magmatiques sont parfois encore visibles comme les structures en coussins, les vacuoles de dégazage ou encore le litage magmatique.

Après 200 mètres de dénivellation, les premiers indices minéralogiques recherchés sont visibles dans les dépôts morainiques (un résumé des minéraux rencontrés figure en fin d’article). Il s’agit de blocs de rodingites rosâtre facilement reconnaissable parmi blocs grisâtres et verdâtres environnants. Les rodingites sont des roches métasomatiques ayant la particularité d’avoir été enrichies en Ca lors des processus de serpentinisation. Ces roches étaient à l’origine, des filons de basaltes ou de gabbros ayant fait intrusion dans les péridotites du manteau.

Après 2h00 de marche, les premiers affleurements de serpentinites contenant les rodingites sont visibles. Il est extrêmement dur d’extraire des minéraux directement des affleurements de rodingites, car ils ont été fortement polis par le retrait des glaciers et les rodingites sont des roches très dures et très peu schisteuses. Il est donc plus simple d’exploiter directement les nombreux blocs dans les éboulis de paroi.  Après avoir trouvé quelques jolis cristaux dans les éboulis je décide tout de même de parcourir les roches moutonnées à la recherche de rodingites.

Après quelques heures passées sur les affleurements, je trouve finalement un filon rodingitique avec une petite poche de vésuvianites vertes à peine ouverte et heureusement pour moi la roche est par endroit un peu fracturée, ce qui me permet de l’attaquer au burin. Après de nombreux coups de marteau les premiers échantillons sont extraits. Les vésuvianites  sont nombreuse et tapissent les bordures de la poche. Elles mesurent entre 1 et 5 mm et sont de qualité gemmes. Ces vésuvianites sont associées à des clinochlores et des diopsides, mais il n’y a pas de grenat dans cette poche. J’ai aussi trouvé de jolies veines de clinochlores pluricentimétriques mais inexploitable… En fin de journée j’ai également découvert un bloc éboulé présentant un magnifique plaquage de grenat (var. Démantoïde) associé à de l’asbeste. Certains sont de couleur vert bouteille ! Les années précédentes, j’avais pour habitude d’exploiter un puissant filon rodingitique contenant des grenats et diopside de taille centimétrique ! Cependant, cet affleurement était inaccessible ce jour-là à cause de nombreuses chutes de bloc. On verra l’année prochaine.

Minéralogiquement vôtre

Nicolas